Note d'experts

Restrictions sur les cookies tiers pour Chrome : explications et opportunités

Mathieu Lima
Mathieu Lima
Mis Ă  jour : 26 nov. 202512 min de lecture

Des restrictions, mais pas de fin des cookies tiers pour Chrome

Les cookies tiers ont joué un rôle clé dans le marketing digital en permettant de suivre les utilisateurs à travers différents sites. Cette technologie offre la capacité de cibler les utilisateurs selon leurs centres d'intérêt ou par le biais de campagnes de remarketing. Elle est également au cœur de la mesure des performances publicitaires et de l'attribution des conversions post-view.

Ces dernières années ont été marquées par l'apparition de réglementations telles que le RGPD et l'ePrivacy, la sensibilisation croissante des utilisateurs à la protection de leur vie privée avec l'utilisation d'adblockers, ainsi que les initiatives de grands acteurs du web tels qu'Apple avec Safari et Mozilla avec Firefox, mettant l'accent sur la confidentialité comme un argument clé de leur produit.

Google s'aligne sur cette tendance marché en prévoyant la mise en place de restrictions concernant les cookies tiers pour Chrome, associée à l’utilisation de nouvelles technologies et pratiques qui permettront aux annonceurs de continuer de cibler leur audience et de mesurer efficacement leur investissement média, tout en limitant le risque sur la confidentialité des données (source).

Ce n’est donc pas totalement la fin des cookies tiers sur Chrome, mais il est probable que certains utilisateurs choisiront de “bloquer” les cookies tiers avec l’expérience qui sera proposée par Google. L’impact sera fortement lié à la manière de présenter l’expérience de choix par Google et à la performance des technologies alternatives comme Privacy Sandbox.

Cette transition représente surtout une opportunité pour les géants du web, tels que Google et les grandes plateformes qui ont un environnement connecté (par exemple Meta et Amazon) qui sont eux capables de développer des alternatives aux cookies tiers. En revanche, elle pose un défi majeur pour les acteurs dépendants des cookies tiers, tels que Criteo, qui ne disposent pas de leur propre inventaire publicitaire.

À noter également que les principaux acteurs publicitaires ont déjà adopté des protocoles de mesure basés sur les cookies first-party, qui ne sont pas affectés par cette évolution mais restent soumis aux régulations telles que le RGPD et aux restrictions imposées par certains navigateurs comme Safari.

Une approche similaire mise en place par Apple sur iOS

Avec ces restrictions sur les cookies tiers pour Chrome, la responsabilité de blocage des cookies tiers sera déléguée aux utilisateurs. Cette approche est similaire à ce qu’a mis en place Apple en 2021 sur iOS avec le blocage de l’identifiant publicitaire IDFA (identifiant publicitaire sur iOS qui est équivalent aux cookies tiers). Ce blocage par défaut de l’IDFA est lié au framework AppTrackingTransparency (ATT). Apple a mis a disposition une technologie alternative : le SKAdNetwork (SKAN), devenu maintenant AdAttributionKit (AAK). 👉 En savoir plus sur SKAN et AAK dans notre note d’experts dédiée à AdAttributionKit.

Les APIs SKAdNetwork permet aux régies et annonceurs d’obtenir des informations de performance des campagnes sans avoir besoin de l’IDFA pour rester dans un environnement permettant de protéger davantage les données personnelles des utilisateurs.

Tous les cookies ne sont pas concernés par ces restrictions

Il est important de reprendre quelques définitions tant les informations qui circulent sur la fin des cookies (tiers) sont imprécises, voire erronées.

Les cookies third-party

Les cookies third-party (cookies tiers ou encore cookies 3rd-party) stockent des informations pour des services extérieurs au site consulté. Les informations sont stockées sur l’appareil de l’utilisateur, ont une date d’expiration et sont partagées entre plusieurs sites, permettant une correspondance et une identification de l’utilisateur cross-sites.

Imaginons un utilisateur A qui visite un site ecommerce (exemple : www.boutiquemode.com) et interagit avec des produits. Un partenaire média tel que Criteo crée un cookie tiers associé au domaine criteo.com avec un identifiant. Lorsque l'utilisateur A navigue ensuite sur d'autres sites partenaires, le cookie permet à Criteo de reconnaître l'utilisateur A et à www.boutiquemode.com de lui présenter des publicités personnalisées, basées sur sa navigation (abandon panier, vue produit, client).

Considérons un utilisateur B qui visite un site d'actualités sportives (exemple: www.sportnews.com) axé sur le tennis. Un cookie tiers est créé par un partenaire publicitaire pour associer l'intérêt de l'utilisateur B pour le tennis. Lorsque l'utilisateur B visite des sites dans le réseau de ce partenaire, il peut être ciblé par des publicités pour des articles de tennis.

Un utilisateur C voit une publicité sur www.sportnews.com pour www.boutiquemode.com, qui intègre un pixel de suivi d'une plateforme ad-centric comme Eulerian. Le pixel déclenche un cookie tiers sur le domaine eulerian.com. Si l'utilisateur C effectue un achat sur www.boutiquemode.com plus tard, la plateforme peut attribuer la conversion à la publicité vue précédemment.

Les cookie first-party (utilisés par des tiers)

Les cookies first-party (cookies propriétaires ou encore 1st-party) stockent des informations appartenant à l’éditeur du site ou aux annonceurs. Les informations sont stockées sur l’appareil, ont une date d’expiration et sont limitées au domaine du site visité.

Les cookies first-party sont conçus, à l’origine, pour aider au bon fonctionnement du site, par exemple en permettant à un utilisateur de rester connecté à son compte lors de différentes visites. Ils sont depuis des années utilisés par la plupart des régies média et autres outils de mesure (Meta, Google, etc.) qui utilisent ces cookies first-party pour notamment pallier l’abandon progressif des cookies-tiers par les navigateurs. Ces cookies 1st-party (au service de tiers) sont déposés sur les navigateurs via des tags ou pixels (Conversion Linker pour Google Ads, Meta Pixel pour Facebook, etc.).

Lorsqu’un utilisateur E clique sur une publicité Facebook pour aller sur www.boutiquemode.com, le lien contient un identifiant unique de clic en paramètre d’URL (par exemple : fbc=123) qui est capturé par le site via un cookie first-party. Si l’utilisateur E réalise un achat lors de cette visite ou lors de visites ultérieures, Meta peut attribuer cette conversion à la publicité initiale, le tout sans utiliser de cookie tiers.

La mesure de la performance publicitaire (post-click) repose majoritairement sur les cookies first-party depuis déjà quelques années. Les outils analytics (site-centric) également.

Si les restrictions sur les cookies tiers n’aura pas d’impact sur les cookies 1st-party, il y a évidemment d’autres tendances du marché qui limitent drastiquement l’utilisation des cookies first-party utilisés pour la mesure des performances des publicités : le RGPD, mais aussi les navigateurs comme Safari qui limitent la durée de vie d’un cookie first-party et qui suppriment les identifiants de clic à partir d’iOS 17 (on parle dans le cadre de Safari de la fonctionnalité Intelligent Tracking Prevention ou ITP).

Quels sont les impacts des restrictions sur les cookies tiers pour Chrome ?

Le marketing digital perd un signal très efficace qui permettait de suivre l’utilisateur entre les sites MAIS il sera toujours possible de suivre et cibler les comportements sans cette technologie :

  • Grâce au partage des donnĂ©es 1st-party (par exemple l’adresse email de l’utilisateur) : qui permet de faire correspondre un utilisateur entre diffĂ©rents environnements.
  • Par le biais de rĂ©gies qui utilisent le fingerprinting ou le ciblage par adresse IP (pratiques pouvant impliquer des manquements au RGPD et Ă©galement de plus en plus dĂ©prĂ©ciĂ©es par les navigateurs).
  • Et par l’avènement de nouvelles technologies dans les navigateurs et dans l’analyse des informations (Google Privacy Sandbox pour Chrome, modĂ©lisation des conversions, IA, etc.).

Mais en entendant que le marché s’adapte et intègre ces changements, il y aura des impacts.

Le ciblage remarketing et l’exclusion d’audience

Les campagnes remarketing reposent essentiellement sur les cookies tiers : elles sont donc directement impactées. La précision et le volume devraient être affectés dans un premier temps : il conviendra de rester particulièrement vigilant sur ce type de campagnes et de leviers.

Par la même occasion, l’exclusion des utilisateurs connus sur vos campagnes de conquête sera moins efficace. Cela pourrait entraîner une amélioration factice des performances sur ces campagnes car elles pourront cibler davantage vos clients (qui sont plus à même de convertir).

Le ciblage par intérêts, Programmatic et DMP

L’achat publicitaire via les régies programmatiques et l’utilisation de DMP classiques (Data Management Platform) vont perdre en performance et efficacité tant que la nouvelle technologie Privacy Sandbox portée par Google n’aura pas fait ses preuves.

Il faudra rester particulièrement vigilant sur les investissements programmatiques pour chercher à mesurer au maximum les performances de ses campagnes et adapter la stratégie d’investissement en conséquence.

Le marché est en train d’évoluer avec l’avènement de CDP (Customer Data Platform) qui offrent une approche davantage centrée sur le client, intégrant des données 1st-party (par exemple l’adresse email) qui sont désormais indispensables pour le ciblage.

La mesure du post-impression dans les outils et régies

La mesure des performances publicitaires post-impression (i.e. est-ce qu’il y a eu une conversion après impression de la publicité ?) est plus compliquée.

  • Les rĂ©gies publicitaires et les outils d’attribution (comme Eulerian) qui ne peuvent pas capitaliser sur les donnĂ©es 1st-party (adresse email), devront adapter leur technologie pour rĂ©cupĂ©rer les informations fournies par exemple par la Privacy Sandbox.
  • Les rĂ©gies mĂ©dia, telles que Meta et Google, qui peuvent capitaliser sur les donnĂ©es 1st-party (car les utilisateurs sont connectĂ©s sur les environnements publicitaires), pourront offrir une vue sur les performances post-impression si le site de l’annonceur active l'envoi des donnĂ©es fournies par l’utilisateur (“user-provided data”). On parle des fonctionnalitĂ©s comme le Suivi avancĂ© des conversions ou Enhanced Conversions pour Google Ads et la Correspondance avancĂ©e ou Advanced Matching pour Meta.

Si vous apportez de l’importance à cette métrique (conversions post-impression) dans votre pilotage media, attendez-vous à quelques turbulences.

La Privacy Sandbox de Google

Une nouvelle technologie émerge avec la Privacy Sandbox (voir notre note d’experts à ce sujet pour plus de détails).

Celle-ci répond au même cas d’usage que les cookies 3rd-party mais dans un environnement plus strict, qui encadre l’utilisation des données dites personnelles et offre plus de contrôle aux utilisateurs. Cette technologie permet notamment de ne pas suivre les utilisateurs de manière individuelle et de les regrouper sous forme de cohortes.

Les usages sont :

1 - Le ciblage

  • Topics API : permet de collecter les thĂ©matiques pour lesquels les utilisateurs ont un intĂ©rĂŞt. Les utilisateurs ont un contrĂ´le sur cette collecte et peuvent modifier / supprimer les catĂ©gories (https://privacysandbox.com/proposals/topics/).
  • Protected Audience API (PAAPI) : permet de gĂ©rer les audiences remarketing de manière Ă  ce que les tiers ne puissent pas suivre le comportement de navigation des utilisateurs sur diffĂ©rents sites. Cette API permet des enchères directement sur l'appareil via le navigateur, pour choisir les publicitĂ©s pertinentes provenant des sites que l'utilisateur a prĂ©cĂ©demment visitĂ©s (https://developers.google.com/privacy-sandbox/relevance/protected-audience?hl=en).

2 - La mesure des performances

  • Attribution Reporting API (ARA) : permet de mesurer les conversions publicitaires de manière plus respectueuse de la vie privĂ©e, sans utiliser de cookies tiers. Cette API Ă©value les conversions dans diffĂ©rents contextes : clics et vues d'annonces, annonces dans des iframes tiers, et annonces dans un contexte de 1st-party (https://developers.google.com/privacy-sandbox/relevance/attribution-reporting?hl=en).

Remarques

  • C’est une approche et une mĂ©canique relativement proche de ce qui a Ă©tĂ© mis en place par Apple avec le SKAdNetwork (SKAN) pour les applications mobiles. De la mĂŞme manière, l’API SKAdNetwork permet aux rĂ©gies et annonceurs d’interroger les performances des campagnes sans devoir utiliser l’IDFA (identifiant publicitaire sur iOS qui est Ă©quivalent aux cookies tiers) pour rester dans un environnement permettant de protĂ©ger davantage les donnĂ©es personnelles des utilisateurs.
  • Meta rĂ©cupère dĂ©jĂ  des signaux dans le cadre de l’Attribution Reporting API : le Meta Pixel envoie Ă©galement les Ă©vĂ©nements de conversion sur le endpoint /privacy_sandbox/pixel/register/trigger :
  • Google Analytics collecte Ă©galement dĂ©jĂ  des signaux dans le cadre de l’Attribution Reporting API avec le mĂŞme type de requĂŞte supplĂ©mentaire que Meta pour les key events GA4 avec le endpoint /privacy-sandbox/register-conversion :
  • GA4 collecte Ă©galement dans toute requĂŞte le paramètre pscdl (Privacy Sandbox Cookie Deprecation Label) permettant Ă  Google de monitorer dans GA4 le statut de dĂ©prĂ©ciation des cookies tiers et le statut d’acceptation des signaux de la Privacy Sandbox pour les utilisateurs de Chrome :

La Privacy Sandbox est la technologie la plus avancée qui devrait permettre aux régies et aux annonceurs de poursuivre la majorité des cas d'usage (notamment le ciblage et la mesure) permis par les cookies tiers pour Chrome.

L’IA et la modélisation des données

Les acteurs tels que Google et Meta recourent de plus en plus à l'IA et aux modèles statistiques avancés pour modéliser les conversions et prédire les comportements des utilisateurs, même s'ils n'ont pas toutes les données "observables".

Google par exemple introduit le concept de modélisation :

  • ModĂ©lisation des conversions dans Google Ads et Google Analytics 4 (plus de dĂ©tails ici 👉https://edgeangel.co/notes/ga4-modelisation-donnees-attribution) qui permet d’attribuer la conversion au bon levier de manière probabiliste, mĂŞme en ayant perdu des signaux.
  • ModĂ©lisation du comportement dans Google Ads et Google Analytics 4 (grâce Ă  l’implĂ©mentation de Consent Mode en version avancĂ©e) permet de restituer les donnĂ©es (i.e. les parcours utilisateurs) mĂŞme en ayant des pertes de signaux liĂ©s Ă  la rĂ©glementation et aux Ă©volutions des navigateurs.

Cette tendance est observée aussi chez d’autres acteurs comme Meta et Criteo et elle tend à s’amplifier avec les restrictions sur les cookies tiers pour Chrome. Ces technologies permettent aux annonceurs de continuer à adresser des campagnes marketing pertinentes aux utilisateurs et de mesurer le retour sur investissement. Cependant, elles demandent aussi aux annonceurs de faire confiance à des modèles "boîte noire" qui deviendront de plus en plus complexes à comprendre et à remettre en question.

Le renforcement de l’hégémonie des GAFAM

Toutes les initiatives du secteur et des différentes régulations (RGDP, ePrivacy, Digital Markets Act, …) visant à renforcer la confidentialité des utilisateurs et à lutter contre les pratiques marketing abusives ne vont pas changer l'ordre établi et encore moins la domination des GAFAM sur le secteur. En effet, seuls les grands acteurs ont aujourd'hui la possibilité de :

  • (1) Faire correspondre les donnĂ©es 1st-party (par exemple une adresse email) des annonceurs avec leurs importantes bases d’utilisateurs, avec les fonctionnalitĂ©s comme le Suivi avancĂ© des conversions pour Google Ads et la Correspondance avancĂ©e pour Meta ;
  • (2) Investir dans les modèles statistiques et la modĂ©lisation pour pallier l'absence de donnĂ©es ;
  • (3) Et surtout, ce sont eux qui dĂ©finissent les nouveaux standards du web et des applications mobiles (initiative Privacy Sandbox menĂ©e par Google, fonctionnalitĂ©s ITP sur Safari et ATT sur iOS menĂ©es par Apple).

Quelles sont les actions Ă  mettre en place pour les annonceurs ?

Les restrictions sur les cookies tiers pour Chrome, en soi, ne nécessite pas de changements majeurs pour les annonceurs. Cependant, elle s’inscrit dans une tendance du marché où il est nécessaire d’investir des ressources dans la collecte et l'activation de la donnée, ainsi que dans la gouvernance dans son ensemble. Il y a également une grande opportunité pour les annonceurs à être le plus performant de son secteur sur ces enjeux data pour gagner ou accentuer un avantage compétitif.

D’après nous, voici les grands axes à traiter :

La gestion du consentement : pierre angulaire du marketing digital

1 - L’évolution des technologies post-cookies tiers va dans le sens de la protection des données personnelles, en plaçant le consentement des utilisateurs comme base légale. La donnée consentie (certains acteurs parlent de donnée zéro-party : données consenties et fournies volontairement par les clients) est clé pour le pilotage des campagnes digitales. Google a développé des fonctionnalités telles que le Suivi avancé des conversions (permettant d’envoyer les données 1st-party à Google et ainsi de palier l’abandon des cookies tiers sur les navigateurs). Cette fonctionnalité exige que les annonceurs fournissent à Google l'état du consentement des utilisateurs pour chaque donnée transmise, plaçant ainsi la responsabilité légale sur les annonceurs eux-mêmes.

2 - Google propose des fonctionnalités comme Consent Mode V2 (CoMo v2) dans sa version avancée, qui permet l'envoi de données même en l'absence de consentement de l'utilisateur. Google limite dans ce cas les données collectées (en offusquant les données personnelles et en ne stockant pas d’information sur le navigateur par exemple avec un cookie 1st-party) et utilise ces signaux pour la modélisation. L'utilisation de cette fonctionnalité se trouve dans la zone grise : les régulateurs n'ont pas encore statué sur sa conformité ou non. Les annonceurs doivent donc évaluer les bénéfices business et marketing de ce type de fonctionnalité en comparaison avec les éventuels risques juridiques. Cette décision nécessite généralement une concertation entre les équipes marketing et juridique qui n’est pas tout le temps facile. Dans le cas de l’activation de ce type de fonctionnalité, il faudra également choisir une solution de collecte et de gestion du consentement (Consent Management Platform ou CMP) compatible.

  • Auditer l’implĂ©mentation de votre CMP et le conditionnement des tags de manière rĂ©gulière pour s’assurer qu’ils correspondent Ă  vos choix en termes de data privacy et mettre en place un processus d’optimisation du consentement en continu ;
  • Statuer sur des fonctionnalitĂ©s avancĂ©es comme CoMo v2 dans sa version Advanced.

Cette nouvelle technologie qui garantit la confidentialité des données des utilisateurs par design (les données personnelles ne quittent pas le navigateur de l'utilisateur) et qui traite des données agrégées, pourrait offrir un cadre d'exemption de consentement sur les tags média.

En effet, en l'absence de données personnelles, on sortirait du cadre du RGPD. Il resterait à évaluer si ce cadre permet de répondre aux critères d'exemption liés à l'article 82 de la loi Informatique et Libertés qui permet d'exempter les outils de mesure d'audience en respectant un certain cahier des charges lors de la configuration.

Une veille constante de la part de vos partenaires analytics et de votre service juridique sur ces sujets semble cruciale pour être en mesure d'adapter la stratégie de consentement en fonction de l'évolution des règles et des usages. Cela permettra aux annonceurs qui sont en avance sur ces sujets de maximiser l'utilisation des données tout en respectant la réglementation et la confidentialité de leurs utilisateurs.

Capitaliser sur les autres données 1st-party

On appelle les données 1st-party les données de vos clients, à savoir en général l’adresse email, téléphone, nom et prénom. Ces données sont disponibles lorsque l’utilisateur est connecté à son compte ou lorsqu’il réalise un achat ou une prise de contact.

Il s’agit d’envoyer ces données aux régies média (données hashées) avec des fonctionnalités comme le Suivi avancé des conversions pour Google Ads, la fonctionnalité User-provided data pour GA4 ou la Correspondance avancée pour Meta, Snapchat et TikTok. Ces fonctionnalités permettent :

  • D’amĂ©liorer la mesure des performances des campagnes ;
  • De pouvoir crĂ©er des audiences pour le remarketing ;
  • De mieux comprendre la connaissance des intĂ©rĂŞts des utilisateurs.

Les régies média ont, de leur côté, les données sur certains de ces utilisateurs car ils sont sur des environnements connectés. Il s’agit donc d’un signal permettant aux algorithmes de ciblage de mieux fonctionner, qui vient compléter les technologies de suivi basées sur les cookies (3rd-party et 1st-party). Ces données deviennent donc clés avec l’abandon des cookies 3rd-party pour Chrome, notamment pour l’activation des audiences remarketing.

Ces données 1st-party valent de l’or pour les régies comme Google et Meta, car elles enrichissent leur connaissance des utilisateurs et augmentent la valeur des audiences vendues aux annonceurs (des audiences qui pourraient être proposées à vos concurrents 🤔 ?). Envoyer ces données dans un autre pays peut aussi poser des questions de souveraineté pour les grandes marques françaises.

En savoir plus sur les fonctionnalités Google qui permettent de capitaliser sur les données 1st-party.

Comment activer ces fonctionnalités ?

  • Avec Google Tag Manager (GTM) Web ou autre TMS et un retravail du marquage dataLayer.
  • GTM Server (sGTM) peut Ă©galement aider pour enrichir les donnĂ©es envoyĂ©es aux outils sans les exposer dans le dataLayer. Dans les faits, on va plutĂ´t privilĂ©gier une implĂ©mentation dataLayer avec les donnĂ©es hashĂ©es mais c’est une possibilitĂ©.
  • Customer Data Platform (CDP) et reverse ETL : ce sont des outils plus puissants pour synchroniser les donnĂ©es 1st-party avec les rĂ©gies de manière plus profonde, avec une architecture utilisant un data warehouse. Ce type d’outils est notamment clĂ© pour le partage des audiences 1st-party.
  • Activer ces fonctionnalitĂ©s avec une intĂ©gration client-side (et/ou server-side) pour les conversions ;
  • Activer un flux de votre data warehouse vers les rĂ©gies avec un reverse ETL pour les audiences en faisant bien attention de n’envoyer que les donnĂ©es pour lesquelles vous disposez du consentement des utilisateurs (Ă©viter si possible les intĂ©grations backoffice/CRM vers les rĂ©gies qui seront compliquĂ©es Ă  maintenir, sur la gestion du consentement notamment, et qui offrent moins de flexibilitĂ©) ;
  • Pour les acteurs les plus matures, la question de l’implĂ©mentation d’une CDP du marchĂ© (Segment ou Rudderstack par exemple) aura de plus en plus de sens.

Optimiser le tracking, notamment pour l’information nouveaux clients

L'abandon des cookies tiers sur Google Chrome aura une incidence sur la capacité des algorithmes à distinguer les audiences de conquête des audiences de remarketing notamment.

Autrement dit, les régies pourraient potentiellement sur-diffuser sur vos clients.

Pour répondre à ces enjeux, nous recommandons de suivre l'acquisition d'un nouveau client (new customer) comme un événement dédié avec un retravail du marquage si besoin.

Il sera important de suivre les performances de vos campagnes à l’aune de cet indicateur et éventuellement de piloter certaines de vos campagnes (dédiées à la conquête) sur cet objectif.

Cela nous semble obligatoire pour piloter le marketing, d’autant plus que la mise en oeuvre est relativement facile :

  • Tracker les nouveaux clients via un Ă©vĂ©nement dĂ©diĂ© et les importer dans les rĂ©gies mĂ©dia ;
  • Suivre les performances (Ă©galement) Ă  l’aune de cette mĂ©trique ;
  • Eventuellement piloter les campagnes de conquĂŞte via cet Ă©vĂ©nement si vous avez suffisamment de volume.

Data-driven attribution, tests incrémentaux et Marketing Mix Modeling

Les technologies et les modèles de mesure évoluent : ils s’adaptent au marché et aux nouvelles normes et réglementations. Les annonceurs doivent suivre ces tendances pour être en capacité de comprendre et maximiser leur investissement media :

1 - L’attribution data-driven (DDA)

  • DĂ©finition : processus d'attribution de crĂ©dit (poids) aux diffĂ©rents points de contact (leviers) pour une conversion donnĂ©e, utilisant vos donnĂ©es et votre historique.
  • BĂ©nĂ©fices : rapide et facile Ă  mettre Ă  l'Ă©chelle. Fournit un aperçu en temps rĂ©el des moteurs de performance, alimentant une meilleure automatisation des enchères et des optimisations au niveau des campagnes, des canaux et inter-canaux (disponible directement dans les outils comme GA4).

2 - Les tests incrémentaux 🔥

  • DĂ©finition : utilise des expĂ©riences contrĂ´lĂ©es et alĂ©atoires pour comparer le changement de comportement des consommateurs entre des groupes exposĂ©s ou non Ă  l'activitĂ© marketing tout en gardant tous les autres facteurs constants (disponible aussi Ă  travers les outils comme la fonctionnalitĂ© Conversion lift measurement sur Google Ads).
  • BĂ©nĂ©fices : mĂ©thode de mesure la plus rigoureuse et fiable pour mesurer la vĂ©ritable performance d’un leviers ou d’une campagne en particulier.

3 - Le Marketing Mix Modeling (MMM)

  • DĂ©finition : modĂ©lisation très avancĂ©e qui utilise des modèles statistiques (sophistiquĂ©s) pour comprendre ce qui gĂ©nère les ventes et la performance. Elle mesure l'efficacitĂ© de l'investissement mĂ©dia en prenant en compte d'autres facteurs externes qui impactent les ventes (par exemple, la saisonnalitĂ©, les prix, l'Ă©conomie).
  • BĂ©nĂ©fices : offre une vue holistique de tous les canaux, des ventes et des facteurs externes. Elle peut Ă©galement fournir une vue Ă  plus long terme de l'impact des campagnes marketing.
  • Le DDA (Data-driven attribution) est plutĂ´t dĂ©jĂ  bien adoptĂ© cĂ´tĂ© annonceurs et nous encourageons Ă  aller dans ce sens pour les acteurs qui sont encore sur une vision last click. Le DDA reste imparfait : par exemple, si on considère le DDA fourni par GA4, il va mĂ©caniquement pouvoir favoriser les campagnes Google Ads qui auront plus de signaux et clĂ©s de correspondance notamment avec la fonctionnalitĂ© User-provided data.
  • La prochaine Ă©tape pour les acteurs avancĂ©s est de mettre en place des processus de tests incrĂ©mentaux pour pouvoir vĂ©ritablement mesurer la performance des campagnes (post-impression) et adapter les budgets en consĂ©quence : c’est une vĂ©ritable opportunitĂ©.
  • Pour les acteurs les plus matures, il s’agira enfin d’aller sur du MMM pour avoir une vue encore plus fine des performances des campagnes et les interconnexions avec les Ă©vĂ©nements externes. Note : le ticket d’entrĂ©e est beaucoup plus important pour activer ce type d’analyse.

Renforcer la collecte avec le tracking server-side (sGTM)

Le tracking et tagging server-side (par exemple avec sGTM) n’est pas une réponse directe aux restrictions sur les cookies tiers pour Chrome car il n’adresse pas les mêmes enjeux et problématiques. Cependant, le tracking server-side va permettre en particulier de collecter globalement des signaux plus robustes pour maintenir et développer vos performances marketing.

Google Tag Manager Server-side va permettre :

  • De rĂ©duire les ressources JavaScript sur le site en capitalisant sur un unique flux de donnĂ©es et en dĂ©portant les requĂŞtes cĂ´tĂ© serveur ;
  • D’être plus robuste en termes de tracking face aux ad blockers et aux politiques de certains navigateurs ;
  • De gagner en contrĂ´le sur les donnĂ©es envoyĂ©es aux rĂ©gies en offusquant des paramètres mais Ă©galement en enrichissant les donnĂ©es.

sGTM est une top fonctionnalité à mettre en oeuvre qui permet de gagner en qualité et en contrôle de la donnée. Nos analyses récentes montrent un gain incrémental d’environ 20% par rapport à une implémentation client-side.

sGTM, dans certains cas, pourra également faciliter l’activation des données 1st-party fournies par l’utilisateur (par exemple User-provided data pour GA4), sans devoir les exposer dans le dataLayer, mais sGTM n’est pas un prérequis ici.

Par méconnaissance ou erreurs d'implémentation, un certain nombre d'annonceurs et agences activent sGTM pour envoyer des données aux régies média sans le consentement des utilisateurs. Non, sGTM n'est pas un moyen de contourner le consentement utilisateur et non, sGTM n'est pas une solution pour pallier directement les restrictions sur les cookies tiers pour Chrome.

Activer sGTM reste évidemment une top recommandation qui permet des gains substantiels en termes de collecte de données et ouvre un certain nombre de cas d'utilisation côté serveur pour aller plus loin (enrichir les données avec des données sensibles, piloter à la marge, suivi des conversions hors ligne, etc.).

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